Les abcès de pied

On rencontre souvent les abcès du pied à l’automne et au printemps. Pourquoi ? Parce que les sabots des chevaux n’aiment pas les changements climatiques.

– Par Michel Trottier, diplômé en maréchalerie du Olds College en Alberta.

Les changements de températures

Les abcès se forment bien souvent lors de variations fréquentes de températures (ex : 4-5 jours de pluie suivis de 3 jours de beaux temps). Ce qui se passe alors, c’est que la corne devient très tendre parce que le terrain est trop humide. Si les pieds du cheval sont le moindrement longs et qu’il y a quelques évasements, alors la ligne blanche est affaiblie. Une petite particule de gravelle ou de sable peut s’infiltrer à l’intérieure de la sole par la ligne blanche.
Après, lors du beau temps sec, le pied va s’assécher et cette particule demeurera prisonnière dans le sabot. Ce qui va causer une infection.

Les corps étrangers

Les abcès de pieds peuvent aussi être tout simplement causés par un corps étranger (ex : une particule soit de gravelle, de terre ou tout objet pointu pénétrant dans la sole). Ce corps étranger, se rendra ainsi jusqu’aux parties vivantes du pied et atteindra les parties sensibles tout en apportant avec lui des bactéries dans les parties vivantes du sabot. C’est alors qu’une infection vient de faire son entrée.

Ils sont une des causes les plus fréquentes de boiteries sévères aux pieds des chevaux. Cela peut aller du cheval qui bute jusqu’au cheval qui ne veut plus porter son poids sur le membre infecté (il marche comme si il avait une jambe cassée).

En résumé

On augmente le risque d’avoir des abcès surtout si les pieds de chevaux sont gardés sur un terrain humide, boueux, insalubre et surtout lorsque les chevaux circulent quotidiennement dans leurs crottins. Lorsqu’il y a, entre autre, une surpopulation de chevaux dans un espace restreint.
Donc à la base, la cause vient la plupart du temps de la négligence du propriétaire : soit qu’on laisse le sabot devenir trop long parce que « on oublie de donnez rendez-vous à son maréchal ferrant sur une base régulière » ou, comme mentionné plus haut, c’est une question d’environnement, d’où vient l’importance de garder les pieds des chevaux bien parés pour que ceux-ci soient forts et solides tout en les gardant dans un environnement plutôt sec que détrempé !

Pour les causes accidentelles, (corps étranger dans le pied lors d’une balade); le cheval boite sévèrement. S’il a encore sous le pied l’objet causant sa blessure, il serait très sage d’appeler immédiatement un vétérinaire afin qu’il vienne faire une radiographie pour déterminer la localisation exacte interne du corps étranger à l’intérieure du sabot. La radiographie va révéler la direction et la profondeur de l’objet ainsi que la structure interne du pied impliqué. Tout ceci va nous donner des informations au sujets de problèmes potentiels qui pourraient survenir à la blessure infligée. Une pénétration située au centre du pied est potentiellement plus sérieuse. Elle peut impliquer l’os naviculaire, la bourse synoviale, le tendon fléchisseur profond et le joint inter-phalangien distal du pied. La partie la plus sérieuse à soigner est la partie du centre du sabot. Elle peut même être fatale à cause des structures impliquées. (il peu tarriver que l’abcès migre vers le haut par les tissus offrant le moins de résistance).

Diagnostic

1 – On vérifie s’il y a de la chaleur dans le sabot, avec la paume de la main (si on n’est pas certain, on va vérifier avec d’autres chevaux à l’écurie).
2 – On prend le pouls digital (au boulet) et on vérifie afin de trouver un pouls bondissant.
3 – On vérifie s’il y a une sensibilité au niveau de la sole, à un endroit particulier.
4 – On regarde afin de trouver une petite fissure ou un point noir sur la sole du sabot.

Que faire en cas d’abcès ? Comment le soigner ?

Dès les premiers symptômes (chaleur à la couronne, pouls élevé, boiterie) et si le cheval est sensible à la pince exploratrice mais que l’on n’y voit rien à l’œil (aucun point noir, aucune fissure). Il faut alors envelopper le pied préalablement nettoyé dans un cataplasme d’argile pour attendrir la corne afin d’aider l’abcès à se frayer un chemin quelque part au niveau de la sole pour l’aider à sortir.

Une fois que l’argile aura travaillé, il y a de fortes chances de trouver une fissure au niveau de la sole. Lorsque l’on a localisé l’abcès, on débride alors celui-ci au plus fort de la boiterie avec l’aide du couteau à corne afin que l’infection se draine le plus rapidement possible. Une petite ouverture sera suffisante à l’obtention d’un bon drainage. On prendra garde de ne pas atteindre les tissus veloutés. Ces derniers chercheront à s’engager par l’ouverture et causeront une douleur supplémentaire. Si on ouvre trop grand, le pied prendra trop de temps à se refermer.

De préférence, il faut ouvrir avant que l’abcès n’arrive à la couronne ou dans les glomes. Sinon cela peut créer une défaillance à la couronne. Ce qui causera éventuellement une seime profonde parce que l’abcès aura brisé ses tissus régénérateurs.

Après l’ouverture, il faut tremper le pied dans l’eau tiède (très important). Un volume d’eau de javel pour 10 volumes d’eau tiède. Laisser tremper environ 15 à 20 minutes. Ceci permettra d’attendrir la corne et de laisser s’échapper le pus. L’eau de javel travaillera sur l’infection. Ensuite, on fait un bandage avec le cataplasme d’argile pendant 4 à 5 jours environ, à raison d’une fois par jour ou jusqu’à ce que la boiterie disparaisse.
Après les bains de pied, il faut garder le tout bien propre, exempt de toute souillure durant le temps du traitement. Après 4 à 5 jours de traitement, normalement le cheval ne boite plus.

On peut alors le referrer ou si on décide de ne pas ferrer le cheval. On doit lui verser de l’iode 2 % ou du bleu méthylène sur la plaie afin de l’assécher et de la garder sèche. Il faut prendre note que le cheval doit être gardé dans un box sur une litière propre et sèche ou il peut retourner au pré.
Le cheval doit avoir reçu auparavant son vaccin contre le tétanos dans l’année en cours. À défaut, il faut appeler le vétérinaire pour lui faire administrer un antitoxine tétanos. Si la guérison est longue à se faire (plus de 4 à 5 jours) et qu’il n’y a pas vraiment d’amélioration, l’usage d’un antibiotique peut être nécessaire.

Quelques trucs de base à titre préventif

Tailler les talons jusqu’au niveau de la partie la plus large de la fourchette, c’est-à-dire le plus loin
possible en arrière. On augmente ainsi la surface portante de contact avec le sol et on permet à
la partie arrière de porter plus de poids, délivrant ainsi une partie de la charge en pince.
Lorsque les terrains sont trop humides, on peut utiliser un durcisseur de corne sur la paroi du
sabot et de l’iode sur la sole afin d’assécher celle-ci et de la rendre plus dure. Garder le cheval
en box sur de la litière sèche pendant plusieurs journées pluvieuses consécutives est aussi
une bonne façon de faire. Ne jamais appliquer de l’iode sur la bande coronaire, et surtout ne
pas oublier de donner rendez-vous à son maréchal ferrant sur une base régulière d’environ 6
semaines afin que votre cheval garde de bons pieds.

– Article extrait de l’Estafette 100 & 101

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